Les Projets de Recherche

Marie-José DALBERA-STEFANAGGI (Université de Corse – CNRS, UMR 6039, BP 52, 20250 Corte )

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UMR 6039  

 

Responsable : Mme Marie-José Dalbera-Stefanaggi, professeur,

Autres personnes ayant accès aux données : Georges Moracchini, maître de conférence ; Jean-Michel Gea, maître de conférence, Stella Medori, maître de conférence ; Muriel Poli, documentaliste.

Projet de recherche :

Problématique : La Banque de Données Langue Corse a pour objectif prioritaire le recueil, la conservation, l’analyse et la « restitution » du patrimoine linguistique corse de locuteurs « natifs » : autant dire que – et la chose devient plus nette à mesure que le temps passe – les sujets interrogés dans le cadre de nos enquêtes linguistiques sont des personnes âgées, qui ont reçu le corse avant – ou en même temps que – le français, et qui ont géré de diverses manières le rapport entre les deux codes en présence. La collecte de terrain fait apparaître – et nos enquêtes nous ont bien souvent permis de suivre le phénomène en temps réel – une évolution dans cette transmission, par érosion puis remplacement du corse par le français. Cette situation, si elle est commune à l’ensemble des régions de France à forte identité régionale, semble cependant, en Corse, décalée. Par ailleurs, en Corse, s’est développée, en relation avec les événements politiques et sociaux de ces vingt dernières années, une évolution inverse, qui conduit les jeunes gens qui n’ont pas bénéficié de la transmission du corse à développer une variété de corse élaborée, en hiatus avec la variété héritée, qui prétend assumer aujourd’hui une fonction de langue nationale : c’est ce que nous avons appelé (cf. bibliographie) une évolution croisée.

On voit donc que si la question de la transmission du patrimoine linguistique n’est pas l’objet premier de nos recherches, elle est cependant constamment présente dans notre démarche, et ceci de deux manières :

-     tout d’abord dans la sélection de « bons informateurs » pour l’enquête dialectologique, c’est-à-dire dans la recherche d’hommes et de femmes qui ont reçu le corse en héritage.

-     ensuite dans les données recueillies elles-mêmes, dans la mesure où toute enquête comporte, à un moment ou à un autre, “l’histoire de vie” des informateurs, riche en commentaires d’ordre épi- ou métalinguistiques.

C’est dire que les données relatives à la transmission du patrimoine linguistique sont abondantes dans les quelque 25 ans d’enquêtes dont nous disposons. Ces données sont cependant sujettes à de nombreuses interrogations : les distorsions entre ce que les sujets interrogés disent et ce qu’ils disent dire ne manquent pas. Certes, on dispose bien, sur le domaine corse, de quelques enquêtes, réalisées dans les années 80, dans une perspective sociolinguistique. Mais ces enquêtes s’inscrivent délibérément dans une démarche glottopolitique : menée par des militants, auprès de locuteurs eux-mêmes militants (les étudiants de l’Université de Corse par exemple) elles représentent davantage un élément constitutif de la situation sociolinguistique de la Corse qu’une tentative d’analyse et d’explication de cette situation..

De sorte que la nécessité d’une enquête aussi objective que possible se fait sentir, maintes fois évoquée par les instances régionales et académiques : le constat que l’on ne sait pas, en Corse, à quoi s’en tenir sur la pratique (et donc la transmission) de la langue est devenu un lieu commun. Une première tentative d’approche de cette situation vient d’être mise en circulation : il s’agit d’une enquête cantonnée au monde de l’enseignement, préparée et conduite par un membre de notre équipe (G. Moracchini). Mais l’on se saurait en rester là. C’est pourquoi nous attendons avec le plus grand intérêt d’avoir accès aux données recueillies dans le cadre de l’enquête « Étude de l’Histoire Familiale » réalisée dans le cadre du recensement de 1999.

-     Le caractère général (sur l’ensemble de la France) sera forcément un argument objectif pour étudier le « décalage » de la Corse, souvent invoqué mais nullement établi de manière chiffrée.

-     La surreprésentation de la Corse, dans un premier temps de l’enquête, au même titre que les autres aires périphériques, est un gage de finesse dans la perspective de saisie d’une situation bien évidemment complexe.

-     La mise en perspective de ces documents avec nos propres données ne devrait pas manquer d’éclairer certains points mais aussi de faire surgir des problèmes de cohérence, qu’il faudra interpréter.

Déroulement : Nous proposons la démarche suivante :

-     mise au point d’une protocole de lecture des données INSEE

-     dépouillement des résultats de l’enquête Famille sur le domaine corse .

-     confrontation de ces résultats avec nos propres données d’enquêtes linguistiques

-     confrontation de ces résultats avec les données d’enquêtes sociolinguistiques sur le domaine corse

-      interprétation des coïncidences et distorsions

Une étape ultérieure devrait prévoir la confrontation de ces résultats avec ceux obtenus dans les autres domaines linguistiques français.